Le Saint-Père émérite Benoît XVI rappelle la vocation de la musique liturgique
Le Saint-Siège a publié le 31 mai une lettre du pape écrite à l'occasion du centenaire de l'Institut pontifical de musique sacrée fondé par
saint Pie X. Adressée au cardinal Zenon Grocholewski, préfet de la Congrégation pour l'éducation catholique et grand Chancelier de l'Institut, le cardinal en fit la lecture le 26 mai à
l'ouverture du Congrès international de musique sacrée, tenu à Rome du 26 mai au 1er juin.
Benoît XVI y précise que l'initiative de saint Pie X, faisant suite au Motu Proprio Tra Le Sollecitudini du 22 novembre 1903, avait fixé le programme d'une profonde réforme de la musique liturgique dans la tradition de l'Eglise et hors de l'influence des genres profanes.
Le Saint-Père souligne la prééminence de la musique grégorienne : « Cette intervention du Magistère dota l'Eglise universelle d'un centre d'étude et d'enseignement fidèles aux indications du Pape qui voulait un retour à la grande tradition grégorienne. En cent ans d'activité, l'Institut a assimilé, élaboré et transmis musicalement les enseignements pontificaux et ceux du Concile Vatican II, destinés à éclairer les compositeurs de musique liturgique, les maîtres de chapelle, les liturgistes, les musiciens et les enseignants ».
Puis le souverain pontife rappelle la finalité de la musique sacrée qui est la gloire de Dieu et la sanctification des fidèles : « Ses critères fondamentaux sont le respect de la tradition, le sens de la prière, la dignité et la beauté, la pleine adhésion aux textes et séquences liturgiques, la correcte participation de l'assemblée, une légitime adaptation aux cultures particulières dans le respect du langage universel, le primat de référence du chant grégorien, une mise en valeur attentive aux diverses autres formes expressives du patrimoine culturel de l'Eglise, la polyphonie et enfin l'importance de la schola cantorum, en particulier dans les églises cathédrales ».
Ce sont des critères importants, poursuit le pape, « à considérer attentivement, aujourd'hui encore ». Le chant grégorien, modèle suprême de la musique sacrée, la polyphonie, la schola cantorum, ont été considérés à tort « comme l'expression d'une conception répondant à un passé à oublier et à négliger, parce qu'ils limitaient la liberté et la créativité des individus et des communautés ». Mais le sujet authentique de la liturgie n'est ni l'individu ni le groupe, rappelle Benoît XVI, « c'est en premier lieu l'action de Dieu à travers l'Eglise qui a son histoire, sa riche tradition et sa créativité ».
« Sur la base de ces éléments sûrs et durables, conclut-il, auxquels s'ajoute une expérience désormais séculaire, je vous encourage à mener votre service pour la formation professionnelle des étudiants, pour qu'ils acquièrent une compétence sérieuse et profonde dans les différentes disciplines de la musique sacrée ».
Quelques mois auparavant, le cardinal Domenico Bartolucci - Maître perpétuel de la Chapelle Musicale Pontificale Sixtine - s'exprimait sur la prééminence perdue de la musique sacrée lors d'un entretien publié dans 30giorni en novembre 2010, intitulé La pourpre et le chœur. « Après le concile Vatican II le latin a été écarté, ce qui a été une erreur tragique. Avec la promulgation du Missel de 1970, le Propre - héritage millénaire - a été éliminé, et l'espace pour les chants de l'Ordinaire a été considérablement réduit par l'introduction des langues vernaculaires. (...) Depuis lors, la musique sacrée et les scholae cantorum ont été définitivement mises à l'écart de la liturgie, en dépit des recommandations de la constitution De Sacra Liturgia de 1963 et du Motu Proprio Sacram Liturgiam de 1964. (...) Avant ces aggiornamenti, le peuple chantait à pleine voix pendant les vêpres, le chemin de croix, les messes solennelles, les processions. Il chantait en latin, la langue universelle de l'Eglise. Durant la liturgie des défunts, tous entonnaient le Libera me Domine, l'In Paradisum, le De Profundis. Tous répondaient au Te Deum, au Veni Creator, au Credo. Aujourd'hui, les chansonnettes se sont multipliées. Il y en a tellement que très peu de gens les connaissent, et que presque personne ne les chante. »